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«Body + Art» film documentaire de Fatma Zohra Zaâmoum: «La question de la fonction de l’artiste m’intéresse»

Visible actuellement à la Cinémathèque algérienne, sise à la rue Ben M’hidi, «Body + Art», 73 mn, est «un documentaire sur l’art contemporain international», réalisé par Fatma Zohra Zaâmoum entre 2006 et 2019.

La réalisatrice s’intéresse d’emblée à l’art de la performance en choisissant deux pays l’Autriche et l’Allemagne durant les périodes des années 60 et 70. Soit post- nazi et fascisme pour voir comment les artistes de l’époque ont réussi à porter leur voix pour critiquer la politique de leur pays.

Ces artistes ne choisiront pas la facilité, d’autant qu’ils vont faire appel à un nouveau médium, à savoir leur propre corps et faire avec leur révolution. Fatma Zohra suivra certains de ces artistes et replongera dans leur passé.

On citera Eva BaduraTriska et Yves Michaud, mais aussi Gunter Brus. En effet, en 1965 Gunter Brus fait une performance intitulée «The Vienna Walk» dans les rues de Vienne et il est arrêté par la police.

La réalisatrice reviendra avec lui sur cette performance que l’artiste va reproduire ou plutôt retourner sur ses pas. Il est à noter que ce dernier qui vivait en Autriche a dû partir vivre en Allemagne car il était persécuté dans son pays qui jugeait qu’il n’était pas apte à élever son enfant.

Il n’était pas le seul à se produire ainsi. Il y avait aussi Peter Weibel, performer également que Fatma Zohra Zaâmoum va interviewer.

Ce dernier apportera ainsi un supplément d’éclairage sur la situation sociale et politique du pays de l’époque. Ce dernier s’interrogera sur le rôle effectif de l’art dans le changement et l’évolution de son pays et dira avoir choisi au final de toucher à plusieurs créneaux, en faisant remarquer que l’art en termes de pouvoir réel, ne peut venir qu’après la politique, la technologie et la science.

La reconnaissance 30 ans après

Quand Gunter Brus revient en Autriche où il accepte de rencontrer notre réalisatrice, ironie du sort, un musée consacre une rétrospective sur son travail, dans ce même pays où il se verra pourchassé quelques années avant.

Cette grande exposition aura comme commissaire Peter Weibel qui affirme à propos de Gunter Brus: «Il transformait le réel en représentation.».

Il estimera aussi que Brus était devenu, à sa manière, le nouveau prophète évangéliste et ce, grâce à sa dégaine singulière, mais surtout à ses discours qui passaient à la télé, où il animait, de nombreuses conférences devant des foules d’étudiants qui absorbaient ses paroles religieusement alors que l’orateur les invitait à vivre dans un nouveau monde, lui «l’anarchiste sain» qui n’était pourtant pas contre un certain «ordre dans la société».

Pour étayer tout ces propos, dont le témoignage de Peter Weibel, la réalisatrice fait appel à de nombreuses images d’archives dont celles des performances données à l’université sous l’intitulé «Art et révolution» ou encore celles de Peter Weibel quand il était jeune…. La réalisatrice donne aussi la parole à un philosophe qui analysera les oeuvres de ces artistes par le prisme de la philosophie.

Dans ce décor fasciste post-nazi, on apprendra que ces artistes étudiants ont été «traités par les psychiatres de malades atteints de pathologies psychologiques» dira ce philosophe qui analysera les formes d’art de ces artistes «qui faisaient dans l’excès à la Georges Bataille, en inventant une culture protestataire, très violente, mais très décalée.»

Art et révolution

Il donnera aussi quelques grilles de lecture à propos du corps, que ce soit dans la culture musulmane ou chrétienne, occidentale, affirmant que «Les corps appartiennent à l’Etat.

À la lumière philosophique, notre corps ne nous appartient pas.» Il en donnera comme exemple l’univers de la pub, sur le bien- être et santé des hommes, tout en achevant sa vision des choses en indiquant que la performance est devenue monnaie courante, aujourd’hui, de façon très repandue, se confondant même avec le monde du spectacle.

Ce milieu-là, s’en est accaparé et pas pour les bonnes raisons, banalisant cet art qui avait d’autres visées à l’époque. «Je voulais comprendre comment la situation dans les années 60 et 70 les a menés ces artistes à franchir le pas.

À rentrer dans l’écran. Au lieu d’être dans la représentation, ils ont choisi de franchir le cap, de passer de l’autre côté. J’ai trouvé que cela avait révolutionné les usages dans l’art», a fait savoir Fatma Zohra Zaâmoum pendant le débat. Et de relever: «Bien sûr qu’on se pose la question de savoir comment faut- il réagir dans sa société, comment peut-on être effectifs, comment devons-nous faire les choses et ne pas être juste décoratifs.

C’est une question qui me taraude depuis longtemps de savoir: est ce qu’on est là juste pour faire des objets qui trônent au- dessus d’une cheminée ou bien, peut -on s’imaginer que cela sert à quelque chose après? La question de la fonction de l’artiste m’intéresse. Je constate que ces gens-là dans un contexte bien particulier ont réussi à être utiles et à modifier quelque chose dans leur société.

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